Poète
Ce soir-là
Ce soir-là je rentrais d'un dîner chiant avec un mec raciste que je ne supportais pas, qui m'adorait (ce con) et qui m'avait fait manger à m'en exploser le ventre comme un préservatif gonflé avec du sirop de grenadine light.
Il était tard, j'étais pressée, prise dans mes pensées. J'insultais l'homme dans ma tête, je réfléchissais, je plaignais le monde de subir tant de haine et de mépris de la part d'un seul homme, j'avais le cœur gros comme mon ventre.
Le soir pesait sur moi comme s'il était tout droit sorti d'une dure nuit d'été, lourde, orageuse, et je m'enfonçais dans ma propre tête, je m'enracinais au fond de mes « pourquoi ».
Mais tout à coup j'ai trébuché.
J'ai regardé à gauche, à droite
Je me suis retournée pour vérifier
Que personne ne m'avait vue
Bizarrement j'ai regardé mes pieds
J'ai regardé le ciel
Et je l'ai vu
Le monde
Le monde est une boule à neige
Au début du printemps
Quand elle a laissé ses flocons s'éclipser pour un ciel immense
Et bleu clair, alors qu'il fait nuit
Et que les étoiles et la lune scintillent à travers le tissu du ciel pâle et sombre
Éclairé par les lumières de la ville qui montent jusqu'à lui.
Le monde c'est la ville, le firmament, unis
C'est les lumières des alentours qui montent, attirées par la nuit
Et qui forment au ciel
Des milliers de petites lunes
Que je pourrais saisir entre mes doigts
Détacher du ciel et poser très délicatement
Un peu plus haut encore
Et rire
La nuit était si douce,
Le ciel était si grand...
Et la rue si brillante
Me draguait
Je l'aimais
Mes talons hauts
Me rendaient si légère
Et j'ai marché plus vite
Plus lentement
J'aurais bien pu courir
J'aurais bien pu danser
Et chanter à tue-tête
Pour faire de ce vif éclair
Un soir de fête
Une éternité
Ce soir-là j'ai chopé la lune
J'ai vu le monde, ce globe infini, immense
Aux parois translucides
Transpercées
Par des flocons d'espoir